Extrait d’un roman en cours de correction

La veille, j’avais vainement essayé de la distraire de ses obsessions. Mes recettes habituelles ne fonctionnait pas et, quand à bout d’argument, j’ai lancé, bêtement : À quoi bon te prendre la tête inutilement. Ce qui est arrivé est arrivé, tu n’y peux rien. Tu n’es coupable de rien, elle s’est mise en colère. Sa fièvre n’arrangeait pas les choses mais je me demande encore comment j’ai pu lui parler avec autant de légèreté. Elle m’a toisée avec un sourire forcé.
– Ouais, quand tu n’as que trois neurones, c’est facile…
– Tu sais trouver les mots, Alice !
– Excuse-moi Lucie, mais je ne suis pas du genre à laisser aller les choses sans essayer de les comprendre. Parfois, je me dis que tu es superficielle.
– Mais je SUIS superficielle ! C’est ma philosophie. Cesse d’analyser le pourquoi du comment…
– Avec le prénom que tu as, tu devrais faire preuve de plus de clairvoyance. La désinvolture est une manière de fuir les problèmes.
– Au moins, je ne m’en invente pas. Peu importe ce qui s’agite dans les abysses, Alice – rime riche, tu remarques. – ce qu’on a sous les yeux suffit largement à notre compréhension du monde.
– Je ne crois pas ce que m’a raconté cet homme sur mon père. Les gens trichent, se racontent des histoires, t’en racontent. Personne n’est sincère.
– Merci, Alice. Moi, je t’ai toujours dit ce que je pensais. De toute façon, il est inutile de chercher un sens caché à ce que te disent les gens. Personnellement, je n’imagine rien, je crois systématiquement ce qu’on me raconte. Je prends tout au premier degré. C’est beaucoup plus simple et moins fatiguant que de chercher ce qui se cache derrière chaque mot. D’ailleurs, pas besoin de mots… Si tu observes la gestuelle de ton interlocuteur, la façon dont-il se tient en face de toi, tu as une idée exacte de sa sincérité. La vague est de la même eau que la mer toute entière.
J’étais vraiment inspirée. De quel roman sortait cette phrase ? Était-ce vraiment le moment de philosopher, de pontifier alors qu’elle n’avait besoin que d’une épaule où s’appuyer, d’une amie compatissante ?