Entretien de l’éditeur avec l’auteur

C’est AUJOURD’HUI que sort mon roman « Le Réveil du crabe lune » chez Zonaires éditions

L’auteur

Vous êtes un auteur de nouvelles plutôt prolifique avec plus de150 titres et lauréat de nombreux concours, alors qu’est-ce qui vous a conduit à écrire un roman ?

    J’ai commencé par écrire un roman, celui là même publié aujourd’hui par Zonaires. J’étais conscient de ses imperfections et le considérais comme un brouillon. J’ai retravaillé certains de ses chapitres pour en faire des nouvelles. Elles ont abreuvé de nombreux concours et alimenté en partie mes deux derniers recueils « Ivresse de la chute » et « Pastel noir » (chez Zonaires Editions)

    Toutes ces années années consacrées à la nouvelle m’ont appris à mieux écrire. J’ai eu envie de reprendre ce roman délaissé. Je dois dire aussi que j’ai profité de l’aide patiente de personnes telles que Magali Duru, rencontrée justement grâce aux concours de nouvelles. Dans ce roman, qui a changé souvent de titre, les concordances d’événements et de dates étaient compliquées à rendre cohérentes. Les apports de Magali m’ont permis de gagner en clarté et en efficacité.

Comment le décririez-vous ?

    Les personnages de ce roman sont les témoins actifs d’un monde en pleine errance. La situation sociale, réelle, montre comment elle influe profondément sur les comportements individuels. J’ai cherché à privilégier  le dynamisme et la tension de l’action en cherchant à éviter tout manichéisme. 

    C’est l’histoire de Jean Leguen, un être indécis en proie à des obsessions délétères. La quarantaine passée, il survit depuis une vingtaine d’années accroché aux rochers d’un coin de côte bretonne. Indolent et solitaire, seuls l’alcool et la mer peuvent encore apaiser son mal-être. Un événement inattendu le conduit à retrouver la cité banlieusarde de sa jeunesse délinquante. Dans un climat social qui est à l’émeute, il sortira de sa réserve et conduira ses anciens et nouveaux amis à l’aider, au péril de leur vie. Quant à ses anciens et nouveaux ennemis, ils le traqueront sans pitié.

Pouvez-vous nous éclairer sur le titre ? Qu’est-ce qu’un crabe-lune ? Que représente-t-il ?

    Le crabe lune est l’un des noms du tourteau aussi appelé crabe dormeur ou clos-poings car il est toujours prêt à brandir ses pinces au moindre danger ou lorsqu’on le dérange dans son sommeil. Le comportement de ce crustacé évoque celui de Jean Leguen. C’est l’un de ses amis qui le qualifie de crabe lune

Quels auteurs ont pu vous influencer dans ce registre noir ?

    Ils sont nombreux et surtout américains. Des auteurs qui ne négligent jamais le paysage où évoluent leurs personnages et qui utilisent tous les ressorts de leur langue pour produire des images sidérantes. Ils n’abusent pas de l’introspection. Les aspects philosophiques, psychologiques ou politiques s’expriment  essentiellement au travers de l’action et des rapports des personnages avec leur environnement.

   Mon auteur préféré est Cormac Mac Carthy, même si ce dernier me désespèrerait plutôt d’écrire tant je trouve son talent indépassable.

Y a-t-il des personnages qui vous ressemblent ou que vous affectionnez plus que d’autres ?

    Jean Leguen est un antihéros, c’est lui que je comprends le mieux même s’il peut se montrer peu sympathique. Ses amis, Léa Jourdan, Pietro Péri et Simon Favenec, sont les personnages positifs du récit, plus « sages », plus facile à aimer. Tout comme les journalistes Nicole Vernier et Daniel Puget ou encore Puisais, le policier désabusé ( un cliché des romans policier que j’ai tenté de déstructurer). Pietro s’appelait en réalité Michel P. C’était le copain de mes quatorze ans. Son caractère m’a inspiré celui de Pietro et, tout comme lui, il a fait un séjour en prison pour le même genre de délit. Je sais qu’il a suivi ensuite une voie plus conventionnelle.

    J’ai cependant une affection particulière pour Franck  Sitbon, un être ambivalent, sauveur et dangereux à la fois… Je crois l’avoir bien connu dans la vie réelle. Il s’appelait Sylvain S, timide quand il était enfant, grand séducteur à l’adolescence. Il a accompli une carrière de scientifique à la différence de ses frères, escrocs et délinquants…

   Le Tché, personnage mafieux du roman est le clone imparfait d’un individu qui était directeur du foyer de jeunes travailleurs voisin de ma MJC. Un ancien militaire baraqué en T-shirt noir ou pull kaki qui portait un pantalon de treillis et des rangers été comme hiver. Très avenant, le gars, malgré sa boule rasée et ses maxillaires proéminents. Derrière son bureau, on voyait un immense panneau arborant une collection d’armes modernes : fusils mitrailleurs, pistolets automatiques etc. (neutralisées, j’espère !) Si tu mets ça dans un roman, personne ne te croit.

    Les décors sont importants pour moi. Ainsi, la Bretagne, où se déroule une partie de l’action est le pendant lumineux et heureux de la toxique ville de Certeuil en banlieue parisienne. Ce sont sans doute ces deux lieux qui sont les « personnages » principaux du roman. La cité des Rémouleurs ressemble à la cité où j’ai vécu plus de quinze années. La MJC du roman est la copie exacte de celle qui m’a ouvert au théâtre, au cinéma, à la culture. C’est dans son sous-sol que j’ai tiré à balles réelles avec un pistolet Luger subtilisé quelques heures à mon père. J’aurais très bien pu tomber dans la même délinquance que mes personnages…

Les personnages ont-ils  été façonnés pour témoigner de quelque chose en particulier ? Ou sont-ils le produit de rencontres ou de faits réels ?

    Comme je viens de le dire, le monde que je décris ne m’est pas inconnu. Mes personnages sont pratiquement tous calqués sur des copains d’enfance ou d’adolescence. Certains ont très mal tourné et je les ai tous perdus de vue. J’ai utilisé leurs personnalités et parfois leur vécu, en les imaginant pris dans une histoire qui retentit avec des événements actuels. Cet univers est celui des cités où vivent des gens délaissés et méprisés par les pouvoirs successifs. Les turpitudes de l’époque n’ont fait que s’aggraver. Leur révolte est la mienne.

7 réflexions sur “Entretien de l’éditeur avec l’auteur

  1. Félicitations pour ce troisième « bébé » qui a vu le jour en automne ! Tes textes précédents (enfin, ce que tu as bien voulu nous en faire « goûter » ! ) étaient très agréables à lire. Je te souhaite beaucoup de succès ! (on le trouve en librairie partout ?)

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