
Cette année-là, tu es vivante. Nous avons le même âge : dix-huit ans.
Tu rentres chez toi le midi.
Je t’accompagne.
Tu me demandes si j’ai faim.
Pas du tout.
Ça tombe bien, le frigo est vide.
Tu sors une soupe en boîte d’un placard. Tu tires sur la languette du couvercle, tu plonges une grosse cuillère dans la gélatine de tomate et tu la touilles.
Tu es belle.
Tu avales de bon cœur ta mixture extra terrestre en me souriant gentiment ente deux bouchées tandis que je convoite tes seins nus sous ton pull léger et que je caresse ta nuque brune. Je sens sous mes doigts une mince chaînette où, je le sais, est pendue une croix d’or. Le soleil joue sur le lit défait que j’aperçois par la porte de ta chambre entrouverte.
Tu pèles une orange qui se dessèche sur la table de la cuisine.
Je n’en veux pas la moitié.
Je te veux toi.
J’écarte le quartier d’orange de tes lèvres et je goûte l’acidité de la tomate industrielle sur ta langue.
Tu regardes la pendule.
Il faut partir.
Nous marchons en silence et tu franchis le portail de l’entreprise qui t’a embauchée pour un boulot d’été. Tu te retournes une fois pour me faire signe et tu disparais tandis que je reste là, le temps que mon désir encombrant perde de sa rigidité.
Une autre fois, je te guette au coin d’une rue et fais mine de te rencontrer par hasard.
Tu es très belle. Une fille blonde t’accompagne. Tu me la présentes. Elle s’appelle Lola, elle ne m’intéresse pas. Tu te débrouilles pour qu’elle s’en aille et tu me parles comme si nous nous étions quitté la veille. Soudain, tu m’annonces que tu es malade. J’ai du mal à te croire tant ton corps exulte. Je te prends la main et cherche au fond de tes yeux je ne sais quoi de rassurant.
Tu me dis que tu as peur et je ne trouve aucun mot de réconfort. Je ne monte pas chez toi en prétextant le manque de temps.
C’est à toi qu’il manquait.
Fulgurant…
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Cruel aussi ! Merci Barbara
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Bouleversant, dur.
Ainsi en est-il du temps inégal.
Merci pour le plaisir de lecture, Joël!
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La cruauté d’un adolescent, adulte repentant. Merci…
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