Récrée

ballon

Depuis la rentrée, il a ramassé trois cent trente-trois marrons dans la cour. Il n’y en a plus par terre. Il regarde les arbres, fasciné par le soleil qui radiographie les feuilles de marronnier.

Choc entre les épaules.

Bousculade.

Il tombe. Genoux en sang.

Il se relève.

Les cris absorbent les couleurs, l’oxygène. Il bondit vers ceux qui tournent autour de lui en hurlant. Il en saisit un au hasard et, soudain, ne voit plus rien. Il reprend conscience, couché sur le dos. Les battements de son cœur résonnent  sous le préau. Il perçoit une voix au-dessus de lui, ouvre les yeux. Le visage du maître occupe tout le ciel. Il ne distingue pas ses traits à contre jour. La lumière est éblouissante, insupportable.

Il détourne la tête et les lacs de larmes dans ses yeux roulent dans la poussière. Gouttes de mercure.

– Te voilà calmé ! dit le maître. Qu’est-ce qui t’a pris ?

Il veut se relever. La grosse patte du maître le plaque au sol.

– Reste tranquille ! Tes parents arrivent. Il faut te faire soigner, mon petit ami !

Les élèves de sa classe font cercle autour de lui, graves et silencieux. Celui qu’il a tenté d’étrangler se tient près du maître, une main sur la gorge.

Plus tard, quand le psychologue lui demande de s’expliquer, il marmonne :

– Ils m’ont dérangé. J’étais tranquille avec le soleil.